De l’art de la mastication

Pourquoi nous répète-t-on toujours de bien mâcher ses aliments ?

Ce geste auquel on ne prête souvent pas assez attention est pourtant essentiel et recèle une cascade de bienfaits.

Comment et pourquoi mastiquer ?

Bien mastiquer, c’est mâcher, couper, broyer ses aliments à l'aide de ses dents*, les malaxer et les insaliver avec la langue, la salive, etc., jusqu'à les réduire en une bouillie homogène. Idéalement, on dit qu’il faut mâcher environ 20 à 50 fois chaque bouchée. Bien sûr, certains types d'aliments requièrent une mastication plus longue. La tradition ayurvédique recommande de « boire les solides et mâcher les liquides » !

Il s’agit du seul acte mécanique volontaire de la digestion.

Ses rôles sont notamment les suivants :

  • Réduire la taille des aliments pour les avaler et faciliter l’action des sucs digestifs : les petits morceaux seront plus facilement attaquables par les enzymes. Les aliments sont humidifiés et lubrifiés par la salive, transformés en bol alimentaire propre à être dégluti.
  • Prédigérer : permet à la salive d’effectuer son rôle de dégradation initiale des aliments, notamment les glucides par l'amylase salivaire et un petit peu les triglycérides par la lipase linguale. Si vous prenez le temps de mâcher par exemple un morceau de pain, vous finirez par avoir un goût sucré dans la bouche lié à la dégradation de l'amidon, c'est le signal de la déglutition.
  • Prévenir et préparer les autres organes digestifs sur la nature et la qualité des aliments : il y a envoi de signaux au cerveau sur le contenu de repas ainsi qu'aux foie, pancréas, estomac, duodénum qui vont pouvoir sécréter les bonnes enzymes au bon moment et non massivement dans l’urgence et sans distinction. Cela permet donc d'économiser les enzymes et de mieux digérer.
  • Soulager les autres organes d'un surplus de travail : une longue mastication permet de faire passer les aliments dans la suite du tube digestif à la bonne température. En outre, de gros morceaux vont requérir davantage de sucs digestifs. L'estomac n'a pas de dents lui !
  • Faciliter le travail d’assimilation des nutriments: réduite à de petites molécules, la nourriture sera facilement assimilable par notre intestin grêle, principal siège de l’assimilation. Alors qu'en l'absence de mastication, les gros morceaux ne seront pas correctement désintégrés ni assimilés, entraînant fermentation et putréfaction par la flore intestinale et engendrant des troubles divers comme les flatulences, les ballonnements, la porosité intestinale… ou encore des carences du fait de la mauvaise assimilation.
  • Permettre la reconnaissance des signaux de la faim et de la satiété et donc une prise alimentaire adaptée. Plus on mange vite, ...plus on mange. Or, la sensation de satiété est déclenchée par le cerveau au bout de 20 min environ, le temps d'évaluer la prise alimentaire. Prendre le temps de mâcher peut donc aider à réduire ses portions et à mieux gérer son poids.
  • Libérer arômes et saveurs, éprouver le plaisir gustatif
  • Assurer l’hygiène buccale : la salive peut neutraliser certaines bactéries, elle nettoie la bouche et garde les tissus souples, évitant les irritations de la muqueuse.
  • Assurer tonicité aux mâchoires et aux gencives
  • Épargner de l'énergie : la digestion accapare 60% de l'énergie nerveuse. En facilitant la digestion, on préserve de l'énergie disponible pour d'autres tâches. Par ailleurs, en Inde, on considère la langue comme le principal organe d'absorption d'énergie prânique après le nez. La bouche est considérée en énergétique chinoise comme un haut lieu d'échange d'énergie.

Une bonne mastication est donc garante d’une meilleure digestion et assimilation, évitant de nombreux désagréments (voir ci-dessous). Elle va permettre ainsi d’épargner de l’énergie et d'améliorer le sommeil puisque l'organisme sera moins occupé à digérer, mais aussi de mieux gérer son poids. Sans compter le plaisir pris à savourer nos repas, à délivrer les différentes arômes... C’est enfin l’occasion d’être pleinement présent à soi, à ce que nous apporte notre nourriture…

 

 

Dangers d'une mastication insuffisante

  • Surmenage et affaiblissement du système digestif dont l'estomac sera souvent la première victime : il peut y avoir une hyper-acidité gastrique avec reflux gastro-oesophagiens, pouvant mener à  une gastrite puis un ulcère...
  • Intestins ballonnés, flatulences, problèmes de transit divers...
  • Assimilation notamment glucidique et protéique compromise...
  • Prise ou perte de poids
  • Diminution de la capacité de filtration du foie
  • Sommeil non récupérateur
  • etc.

La mastication est donc partie intégrante de la préservation d’une bonne santé sur le long terme.

 

Comment augmenter sa mastication ?

Si cela peut sembler contraignant au premier abord, l'habitude est vite prise. Au début, on peut s'aider en comptant, mais bien vite, le simple fait de sentir que la bouchée n'est plus qu'une bouillie sera suffisant.

  • Prendre de petites bouchées
  • Poser les couverts entre chaque bouchée
  • Manger lentement, dans le calme, en conscience : idéalement, il faudrait manger sans faire autre chose en même temps (ni lire, ni regarder un écran..., éviter les discussions trop animées..) afin de se concentrer sur l'acte de manger : en prenant conscience de la nourriture, de sa forme, ses odeurs, saveurs, textures..., de là où elle vient, de comment elle a été produite, par qui et de toute son histoire jusqu'à notre assiette. Cela nous amène par ailleurs à éprouver gratitude et abondance.
  • Respirer lentement, effectuer trois grandes respirations entre chaque plat

 

*Zoom sur les dents

Suivant leurs fonctions, celles-ci ont des formes différentes :

  • Incisives : coupent les fruits et légumes
  • Canines : déchiquètent la viande. On remarque au passage que nos canines sont faiblement développées.
  • Prémolaires : broient les graines et les légumes fibreux
  • Molaires : broient et meulent céréales, légumineuses et autres graines